mercredi 10 décembre 2014

Camp de réfugiés

Hier je suis allée dans un camp de réfugiés.
Comme tout le monde j’en avais déjà entendu parlé, mais je n’en avais jamais fréquenté.
Dû moins pas comme celui d’hier, où il y avait dans l'air un parfum de guerre.
Sitôt arrivée j’ai été choquée, brassée, bouleversée.
J’ai hésité entre fulminer ou me mettre à pleurer.



A perte de vue du gris, sans vie.
Des panneaux suggérant de faire attention, pour éviter toute contagion ou propagation d’infection.
De la nourriture rationnée, qui plus est, de mauvaise qualité.
Des gens en uniforme chargés de veiller, de soigner, mais tellement militarisés, contrôlés, blasés que toute empathie semble les avoir quitté.
Et des mères, des grands-mères, des personnes âgées, des enfants blessés.
Tous alignés, attendant d’être soignés.
Tous numérotés, abandonnés, effrayés de se retrouver coincés dans ces lieux désâmés.
Tous désemparés, dépouillés, déshabillés, ayant pour seul couvert de leur intimité, une tunique bleue nouée par derrière, laissant le dos et les fesses à l’air.
Et les mots, les propos, plus durs que de la pierre en plein hiver.

Déficit immunitaire ou crise humanitaire ?

Parce que finalement vous l’avez compris je n’étais pas en Arménie ou en Syrie, non c’était rien de plus banal qu’un rendez-vous à l’hôpital.

Je ne comprends pas, comment on a fait pour en arriver là.

Est ce que l’on doit obligatoirement enfermer pour soigner ?
Est ce que l’on doit forcément user de pouvoir, pour faire son devoir ?
Est ce que l’on doit assurément meurtrir pour permettre de guérir ?
Est ce que le vert, le rose, le orange sont vraiment si dispendieux, comparativement au beige et bleu hideux et cafardeux ?

Certes on a rassemblé, dans des salles hyper équipées, de quoi sauver des vies qui auraient pu trépasser. J’en suis reconnaissante depuis une nuit particulièrement souffrante.
Mais on a oublié de laisser passer la lumière, celle qui fait que la vie s’épanouit depuis des millénaires.
On a oublié la nature et ses murmures entre ces murs.
On a oublié les chamans et les sages-femmes.
On a oublié le soleil qui n'a pas son pareil. 

Pendant cette matinée j’ai eu la sensation d’être retranchée, capturée, malmenée, emprisonnée.
J’ai eu l’impression que tout ceux qui m’entouraient, momentanément indigents, ébranlés, auscultés, mutilés, irradiés, handicapés, disséqués, épuisés, opérés, endeuillés ou accouchés, étaient mis au rancard, entourés de remparts, pour les mettre à part.

Coupés de la vie,  alors que justement ils avaient besoin de recharger leurs batteries.

J’ai pleuré et je me suis réfugiée dans notre forêt, en formulant le souhait, qu’un jour la santé soit quelque chose de globale, loin d’un hôpital.


1 commentaire:

  1. J'ai le même sentiment en visitant un hôpital... Et le même réflexe du besoin de retourner dans la forêt!
    On est LOIN d'avoir un système de santé...

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