vendredi 30 mai 2014

Une naissance heureuse



Aujourd’hui, cette nuit plutôt, un miracle a frappé, pendant que l’on dormait ! Je ne vous avais pas encore parlé des péripéties à l’ancienne bergerie, alors voici, vous allez être servis !
Samuel est arrivé de Californie, au milieu de la nuit et m’a tiré de mon lit en me disant : ‘’Tu peux me dire ce que c’est le petit âne dans l’enclos’’. Et bien qu’à peine réveillée j’ai su que je n’avais pas rêvé. Je l’avais vu se profiler, son bassin se dessiner, les hanches pointer, j’avais douté… mais on ne l’avait pas fait accoupler. Il n’y avait rien à tergiverser ou observer, alors j’étais retournée à mes activités. Et voilà que ce matin un petit âne était né.

Je n’avais rien imaginé, Framboise notre jeune ânesse était en fin de gestation et avait bel et bien donné naissance à un petit ânon.
Ainsi ce matin, la tribu des bois est en émois, Framboise a mis bas.
On l’a observée, admirée, surveillée. On s’est exclamé, câliné, émerveillé… puis chacun est retourné à ses activités. Sauf moi, qui suis restée là, accroupie dans un coin, à observer de loin, ce miracle du printemps, le cœur encore battant. Apaisée et tiraillée en même temps. Séduite, émue puis aussi troublée, chavirée.
La surprise était de taille et en même temps on avait manqué toute l’effervescence de la naissance. On ne l’avait pas guettée ni accompagnée ou veillée. On n’avait même pas préparé un petit coin adapté, paillé à souhait. Sans piscine, sans massage, sans mère ni grand-mère, au milieu de la nuit dans un îlot de forêt, avec la lune en guise de lumière tamisée, Framboise s’est couchée, elle a poussé, puis son petit est né. Elle s’est redressée, l’a léché, l’a bousculé pour l’encourager à se lever, puis l’a dirigé pour une première tétée.

C’était fait ! La vie venait de se perpétuer. Et ce n’était même pas compliqué.

En même temps que j’appréciais, je m’inquiétais. Est-ce que le petit avait tété? Est-ce qu’il avait assez tété? Qu’est-ce que je devais faire, qu’est-ce que je pouvais faire ? Rien. Tout allait bien. Framboise ne voulait pas que l’on s’approche et jouait son rôle de mère, en faisant barrière, entre son petit et le reste de l’univers.
C’était parfait, la nature dans sa beauté, sa simplicité et perpétuité.
Et pourtant la peur, la peur de perdre, celle que la Vie s’arrête, la ténacité de la fragilité, de la précarité et j’ai eu le goût de pleurer. De pleurer toute la légèreté et toute la peur qui chavirent notre humanité. La peur qui nous fait poser des gestes non désirés, cautionnés des décisions pleines de regrets, accoucher dans des chambres aseptisées, entourées de machines programmées, de médecins formés prêts à réagir et enrailler le risque de mourir. La peur de ne pas savoir, d’être dans le noir, de frôler le désespoir. La peur de ne pas être à la hauteur, le petit moi intérieur qui se meurt. La peur, parce que nous n’arrivons pas toujours à nous connecter, à notre identité, à ce à quoi nous sommes liées, à la nuit, à ce qui ne fait pas de bruit, à la Vie.

Moi qui vie dans le bois, qui écoute ce que la nature me murmure, revendique le respect, l’authenticité, l’intégrité, la liberté d’éduquer et de materner, moi qui m’abreuve à cette source bio ecolo enviro depuis des années, j’avais du mal à laisser mon animal anneler en paix. Comme si le fait d’intervenir justifiait notre présence, notre compétence ou notre bienveillance. Alors j’ai compris qu’en me privant de ma confiance j’aurai perpétué tout ce que j’ai à reprocher à ceux qui m’ont scolarisée, formée, embauchée, accouchée, jugée, domestiquée. En regardant notre petite ânesse j’ai eu accès à une portion de sagesse; cette magnifique surprise m’apprenait le lâcher prise et faire confiance à l’existence.

Merci la Vie !

*Framboise est arrivée chez nous, l’an passé presque jour pour jour. Les ânes ayant une gestation de 12 à 13 mois, elle avait dû s’accoupler juste avant son départ. Avec elle, s’amorçait tout un nouveau projet… et nous n’étions pas au bout de nos surprises !

jeudi 22 mai 2014

Marie Alexis





Marie Alexis a perdu son bébé dans la nuit. Marie Alexis a trouvé son bébé froid dans son lit. Syndrome de mort subite du nourrisson, qu’on lui a dit…  Une absence de raison en guise de consolation. Marie Alexis a perdu son bébé en or, son trésor.


Marie Alexis, voulait quatre enfants… quatre enfants avant ses 40 ans. Pourtant la vie s’acharnait à les lui retirer. Au moment où le petit dernier s’était manifesté, la plus jeune s’en était allée.
Marie Alexis a dû enterrer son bébé, accepter de s’en séparer.
Marie Alexis est dévastée.
Marie Alexis pleure toute la journée.
Marie Alexis continue de préparer le dîner.

Tout ce qui lui reste c’est l’odeur d’un petit pyjama qu’elle a gardé et un trou dans le cœur à tout jamais.
Les jours, les nuits, les semaines ont passé comme un chapelet égrené de questions sans réponse, de prières amères.

Puis doucement, elle a pensé que sa petite boule de lumière avait peut être autre chose à faire… autre chose à faire, d’une autre manière. Autre chose à faire même si ça avait brisé son cœur de  mère.

Marie Alexis a continué de faire ses journées.
Marie Alexis a travaillé fort pour essayer d’accepter.
Marie Alexis a promis de ne jamais l’oublier.

Voilà plusieurs mois que sa petite fille est partie et son ventre a grossi.

Marie-Alexis va bientôt accoucher… avec toute sa force et sa fragilité.
Unissons-nous pour lui envoyer nos pensées et la supporter.
Formons un cercle de lumière pour cette mère.
Une bulle d’amour, pour ce grand jour.
Un parapluie de bienveillance pour sa renaissance.
… un petit bébé, mouillé, plissé, va se pointer et avec lui une nouvelle vie va commencer.
Une vie d’émerveillement et de regret, que la famille ne soit pas au complet.
Une vie avec ses enfants, ceux que la vie donne et reprend.
Une vie de maman, avec ses enfants... qu’ils soient morts ou vivants.

dimanche 11 mai 2014

Bonne fête des mères



Je voulais écrire quelque chose pour la fête des mères … j’avais hésité entre plusieurs idées, des plus sombres et d’autres plus gaies. Puis hier alors que j’arrivais à la maison, j’ai eu une inspiration!
J’étais partie de bon matin, déjeuner en ville avec ma mère. A mon retour, je retrouvais les enfants, mais aussi ceux d’une amie que nous gardions pour la journée. Une amie qui avait eu l’audace d’explorer sa passion et de retourner, sur les bancs de l’université. Une maman qui au travers de ses trois enfants, avait su garder vivant son talent, son désir de création, réflexion et de réalisation ! Une amie, maman, femme, sœur, qui malgré son labeur, ses noirceurs et humeurs, donne des heures, ouvre son cœur, partage ses couleurs.
Tout ça pour dire que toute une joyeuse trâlée était en train de s’ébrouer à l’air du temps d’un nouveau printemps ! Alors je les ai admirés, observés, embrassés. J’ai apprécié, remercié et trouvé ce que j’allais vous raconter pour célébrer cette journée de mères dévouées !!!
D’un côté, il y avait les deux grands en train de jouer au hockey. Jouer au hockey de façon tellement passionnée. On ne parle pas seulement de puck et de bâton pour essayer de marquer. Non il y avait une équipe au complet, des joueurs qui se faisaient échanger, des commentateurs pour animer, une foule qui applaudissait !!! Chacun dans son rôle, son interprétation, l’incarnation d’une ambition.
Un peu plus loin, les petits couraient de tout bord tout côté en toute liberté dans le boisé, avec leur filet à papillon, tout en turlutant des chansons !
 Les filles quant à elles étaient avec les animaux à leur distribuer des brins d’herbes pour les apprivoiser, des caresses pour les apaiser, avant de se mettre à les brosser si elles voulaient les monter.
Puis le voisin est arrivé, alors on a discuté… pendant que les enfants me réclamaient !!!
‘’Allez, on est prêt!!!’’
Et la journée a continuée… Des petites filles sur le dos d’une ânesse amadouée, des boissons improvisées selon une recette inventée. Des poupées à habiller pour ensuite les promener. Des grands garçons s’essayant au tir à l’arc, enjoués et concentrés. Puis enfourchant leur vélo pour pédaler, courser, rivaliser et finalement s’attendre pour rigoler ! Et les petits joyeux et poussiéreux à force de jeux, dans le sable et la terre de la serre. Émerveillés devant la poule sur son nid et impatients de voir enfin, les poussins. Pendant ce temps, je râtelais tout en les observant, cueillant des moments si doux au cœur d’une maman.
Parce que dans tous ces petits gestes, fantaisies et envies,  il y a ce qu’ils sont et ce qu’ils ont appris. Il y a les petites graines semées et celles soufflées, rapportées, partagées. Il y a la légèreté d’avoir des enfants en santé,  celle d’être entourée, de vivre sur une Terre en paix, d’apprécier tant de beauté et… de récolter. Il y a la sensation de goûter à un moment d’éternité; celui où il n’y a plus de tourment ni de débordement, simplement des enfants et une maman, qui profitent de l’air du temps, d’un nouveau printemps.
Bon printemps avec vos enfants, belles Mamans !

jeudi 8 mai 2014

Maman débordée



Samuel est partit en Californie, à un congrès de palmiers ! Et comme chaque fois qu’il est loin quelque chose survient. Bon ce n’est pas qu’il soit un as du bricolage, non c’est juste la sensation d’être deux pour partager les décisions, tensions, tergiversations … ou simplement s’occuper des enfants, le temps que j’aille de l’avant ! Parce que pour tout avouer, la pro du marteau, c’est plutôt moi;la maman qui en fait un peu trop ! A preuve le toit a enfin fini de couler, à force de pelletage je suis venue à bout de ces maudits flocons qui dégoulinaient de notre plafond !
Ainsi la journée, avait plutôt bien commencée. Bon je sais je vous l’ai déjà fait celle-là. Pourtant c’est bel et bien ça. Bon j’étais un peu fatiguée, la nuit avait été écourtée, parce que la veille un manque d’eau dans les tuyaux m’avait tenue éveillée. En effet arrivée tard à la maison, le mercredi étant toujours de la folie, j’avais appelé mon père à la rescousse et espéré pouvoir prendre une douche. Il m’avait donc piloté à distance dans un dédale de robinets à purger et de tuyaux à vidanger, au bout duquel enfin nous avions de nouveau, de l’eau ! Et comme chaque fois où je me couche tard, un des trois têtards, décide d’émerger de bon matin, avec entrain ! 5h30, le soleil brille on s’habille, les oiseaux chantent tandis que moi je déchante … quelle belle heure pour amorcer une nouvelle journée !!!
D’autant qu’elle s’annonçait chouette… je vous l’ai déjà dit, je sais oui.
Pour la première fois depuis une éternité et après 1000 tentatives échouées j’avais enfin trouvé une jeune fille pour venir me relayer auprès de ma trâlée. J’allais donc avoir un matin tout à moi sans chicane à gérer, ni permission à négocier. Un matin tout à moi, pour avancer les préparatifs du congrès, passer des coups de fils sans avoir à enfourner un de mes nénés dans une petite bouche qui n’arrête pas de s’égosiller. Un matin tout à moi, concentrée, pendant que les enfants allaient s’amuser !
Et ça a marché !
J’ai presque bouclé ce que j’avais envisagé. Et lorsque la gardienne est partit à 2h, j’ai honoré ma promesse et nous sommes allés entailler nos trois érables ! Oui, oui on allait être capable ! En plus d’être une pro du marteau, je savais aussi manipuler la perceuse… ça me rendait heureuse ! (L’été passé je me suis éclatée, j’ai fait un poulailler et un clapier !) Après, nous nous sommes lancés dans la confection de chocolat, mais ça vous le savez déjà ! Wow ça c’était de la journée et il restait encore toute la soirée pour en profiter.
C’est alors que l’on croit qu’on a assuré, que l’on se permet de se féliciter de notre journée, que l’on se surprend à rêver de quelques minutes de tranquillité que tout se met à basculer. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais on dirait qu’à partir de 5h le temps se met à défiler en accéléré ! Tout à coup c’est l’heure du bain, de ranger la pagaille de la journée, de préparer le souper et c’est LÀ que le dérapage se passe. Petit Caillou était dans le bain, avec sa sœur pas loin, le souper était déjà démarré, il ne me restait plus qu’à laver les plats pleins de chocolat et avec un peu de chance il me resterait quelques instants, pour terminer ce qu’il me restait à envoyer pour l’organisation du congrès.
Mais non, d’un seul coup, j’entends de l’eau couler, j’ai les pieds mouillé; la cuisine est inondée ! Après en avoir manqué hier voilà qu’à présent, c’est le débordement. Vite des débarbouillettes, des serviettes pour se presser d’essuyer et d’éponger, car en dessous c’est l’atelier ! Certes les palmiers vont apprécier ce surplus d’humidité, mais les bidules électroniques, eux, risquent de ne pas résister.  Ensuite couper l’eau, tout de GO. C’est le tuyau du robinet de l’évier qui a flanché, usé, plié, craqué… Super, en plus de devoir laver par terre, il va falloir me taper le placard sous l’évier ! Je sais c’est une belle occasion, de le nettoyer à fond. Car il faut avouer qu’il ne m’arrive jamais de me lever, radieuse et motivée, en me disant yé aujourd’hui je me fais le dessous de l’évier !!! Sauf que j’avais d’autres projets pour la soirée… Tous les produits de nettoyage sont mouillés, le recyclage est détrempé. Il va falloir tout vider. Et où est le GROS bac à recyclage, pour faire ce fameux ménage ? Bien au chemin, forcément ! Et au chemin chez nous, c’est au BOUT du chemin. Il faut prendre une marche qui est assez longue pour avoir le goût d’emmener le chien !!! Heureusement mon grand y va pendant que j’amorce l’essorage et l’essuyage. Et je vide et j’essuie tout en en profitant pour faire le tri ! Après un certain temps, le débordement est résorbé… enfin à moitié !
Avec tout ça, Petit Caillou est tout ratatiné dans son bain qui a duré une éternité, j’ai oublié d’étendre la dernière brassée  qui va être toute fripée, et en plus le souper a collé; nous voilà avec rien à manger, sans compter que les enfants sont fatigués. Aussitôt mon petit loup séché, je fonce m’occuper de la brassée, espérant du même coup dénicher dans le congélateur quelque chose de tout prêt. Mais pas de chance en arrivant dans la chambre de lavage je réalise qu’hier soir j’ai laissé tout en plan, devant l’heure avancée et la nécessité d’aller coucher les enfants. Ainsi il y a une multitude de seaux d’eau à transporter et vider avant de pouvoir accéder au linge à sécher et dénicher l’espoir d’un souper !!! Mais le congélateur est désespérément vide… il semble que je sois arrivée au bout de mes réserves et pas seulement celles du garde-manger ! Pour une fois, je me surprends à rêver d’habiter ailleurs que chez moi, afin de commander une pizza et d’en terminer avec cette journée. Mais au fond de notre bois, les livreurs ne viennent pas.
Heureusement, la vie est bonne, caché derrière les boîtes de céréales, j’ai trouvé un sac de riz, un des rares aliments qui fait l’unanimité de ma tablée. Avec un peu de chance Petit Caillou en mangera suffisamment pour avoir le bedon assez rempli et lui passer l’envie, de me réveiller pour téter. Et demain sera une autre journée.
Bon je vous laisse je suis crevée !