dimanche 27 novembre 2016

SPM; Libérer la fureur

Il y a quelques jours une amie m’a partagé la publicité d’un parfum en la renommant « Délire prémenstruel »
On y voyait une femme s’apprêtant à entamer un défilé de monde.
Le décor est léché, lisse, parfait, l’ambiance guindée à souhait !
Puis les consignes alentour se muent en un bourdonnement.
La femme cligne des paupières, signe ultime de son changement d’état.

La fluidité laisse place à des mouvements rapides et saccadés.
La femme grimpe aux murs tel un animal sauvage.
Chacun de ses pas qui martèle le sol donne lieu à des éclairs.


Voilà comment je me sens depuis deux jours; une curieuse envie de foudroyer tout ce qui croise mes pas, bouge autour de moi !
Pourquoi? Je ne sais pas.
C’est arrivé comme ça, sortit de nul part, pour rien; accompagnée d’une furieuse envie de hurler, de griffer, de graffigner !
Tout à coup tout me heurtait, m’offusquait, m’irritait.
Je voulais juste m’en aller, partir, loin, battre en retraite plutôt que battre quelqu’un.
Mais je ne l’ai pas fait, la journée était chargée.
Alors j’ai ravalé, respiré, rabroué…
Je me suis contenue, confondue, jusqu’à m’écrouler en fin de journée; vidée, achevée.
Ouf la vague était passée.

Les mois précédents l’Enchanteresse m’avait habitée avec subtilité. Je faisais l’expérience de l’intuition alors que là je flirtais avec la destruction …

Pourtant une fois les enfants couchés, bientôt débarrassée de cette maudite journée, la bête est revenue. J’ai été prise d’une envie de me relever, me relever et balancer des assiettes sur le plancher ! Des piles et des piles, les unes après les autres, les voir se rompre, voler en mille morceau au contact de la céramique et libérer dans leur  fracas toute la colère accumulée en moi. Toute ma tension, ma frustration, mon insatisfaction.
De quoi ? Je ne sais pas.
Mais je savais que la boule de fureur qui logeait en moi devait être évacuée, libérée ne me fasse trop peur, trop de torpeur, trop de frayeur. Par chance Morphée est vite passée, mettant fin à mes idées destructrices qui auraient mis en péril notre déjeuner !!!
Ainsi le lendemain a commencé doucement, puis le rythme s’est accéléré et avec lui la bête s’est repointée. Prise dans une frénésie de ménage j’étais de nouveau en furie… en sursis.
Alors que d’ordinaire les maisons aseptisées me puent au nez, là j’avais des envies militaires; organiser un régiment et procéder à un rangement… un grand ! Que plus rien ne traine, ne dépasse, ne sente ou ne bouge ! C’est alors que sentant que l’atmosphère étant en train de surchauffer, l’homme est sortit de sa tanière demandant ce qu’il pouvait faire.
Alors je me suis vue comme cette femme animale, sauvage, à grimper aux murs et balancer des éclairs, marteler mes pas sur le plancher et projeter du feu à chacune de mes enjambées telle une dragonne déchainée, fulminante, pleine de pouvoirs insoupçonnés. La bête était de nouveau réveillée, revenue au galop, prise de rage, d’une envie de détruire, de fuir, de courir !
Libérer de l’énergie
Libérer de l’énergie
Libérer de l’énergie
Évacuer avant d’exploser … mais de nouveau ce n’était pas la bonne journée. Elle aussi était pleine à craquer.

Comme souvent c’est mon amie Isis qui m’a ramenée, ramenée dans mon intégrité, dans ma légitimité, dans ma créativité.
Mon amie Isis à qui j’ai dompé ma culpabilité de me sentir dans cet état, tandis que je suis en train de l’accompagner illico à son traitement de chimio. Parce que franchement mes petits états d’âme à côté de ce qu’elle vit c’est n’importe quoi. Et pourtant elle m’a rappelé que c’était son combat. Ça m’a raplombée un tantinet mais ça ne m’a pas empêcher de m’enrager, de m’énerver, de m’indigner de ma belle maison, avec mes beaux enfants, notre bonne santé pendant qu’il n’y a plus de vie en Syrie, que les Sioux meurent de  froid dans le Dakota, que le clown commence sa fiesta, sans parler de tout ce qu’on ne sait même pas! Et là c’était plus fort que moi, j’étais en train de lever le ton, de m’énerver, de bouger mes mains de tous les côtés, de décliner le chapelet au grand complet. !!! J’étais fâchée, coupable, pleine de ressentiment qui grondait par en dedans et de nouveau cette envie de fuir, de détruire … pendant que mon amie se bat pour ne pas mourir.
Puis Isis me dit : « Tu sais quand tu parles comme ça, de la tension dans ton corps,… il y a quelque chose là, tu devrais danser, le libérer ! » Et vlan ! Dans les dents ! Les mots sont doux, mais la claque magistrale et ça fait mal ! Parce que oui, maudit, le moton est pris … pris par en dedans !
La voilà qui continue; «  Tu le dis à la yourte dans des ateliers, il faut trouver une façon d’évacuer, de créer, de libérer les tensions accumulées, inventer un chemin de guérison , une porte de sortie pour renouer avec la vie. »
Mon amie Isis qui s’en va à son traitement de chimio de la musique dans les oreilles, des couleurs plein son sac avec toute sa sérénité continue de me partager « Pis tu sais, dessiner sans penser, frotter le papier, gratter, déchirer, brûler, ça fait tellement de bien, tu devrais essayer !» Elle savait que je savais. Elle me prenait juste par la main, pour me remettre sur mon chemin… celui que j’avais perdu, parce que je n’avais pas bien regardé où je mettais les pieds, trop occupée à avancer. Je l’écoutais comme quelqu’un qui nous raconte une histoire oubliée … comme si avec ses mots je me rappelais, me remémorais, me souvenais.

Puis nous sommes arrivées, alors je l’ai déposée… en même temps que ma culpabilité de ne pas l’accompagner, mon jugement de ne pas faire autrement. Alors je me suis dit que je n’irai pas faire l’épicerie en l’attendant, je ne continuerai pas à faire semblant. Pendant qu’on allait affliger à son corps et à son âme un traitement de guère je n’allais pas rester là à rien faire … à me nier, à m’oublier. La yourte m’appelait, ça battait dans mon cœur comme une urgence, une exigence; me rapprocher de mon essence.
À peine arrivée j’ai saisi les hochets et les ai secoués, battus comme jamais et j’ai crié, hurlé, dansé… tellement que mon périnée a lâché … une femme sauvage dans toute sa lâcheté.
Tant pis j’ai recommencé, encore et encore, crié, hurlé, libéré ma furie, sorti l’énergie ! Puis ce fut au tour de mes cordes vocales de lâcher… pourtant je n’avais pas terminé. Il en restait encore, encore de cette fureur longtemps endormie, mais à présent réveillée, encore de cette dragonne déchainée. Alors j’ai sauté, j’ai trépignée, j’ai louvoyé, j’ai grogné, rampé, je me suis déhanchée, désarticulée, démembrée… libéré quelque chose qui était emmuré pour finalement tomber, épuisée. Épuisée et émerveillée devant cette porte qui venait de s’entrouvrir; ma fureur était partie alors que mon corps avait pris vie !
Histoire d’être bien certaine d’avoir tout évacué et parce que je pensais à Isis j’ai sorti les pastels gras, étendu du noir, du noir avec du rouge, tapé, barbouillé, gratté, respiré, respiré encore, ça y est c’était passé. Alors j’ai pris mon tambour et j’ai chanté, remercié




Épilogue
Le lendemain je me suis levée le corps lourd, fatigué, le moral en miette, la larme facile.
La fureur de l’enchanteresse faisait doucement place à la sensibilité de la sorcière. Lentement, mes pas me conduisaient au grand saignement, la possibilité d’intégrer l’enseignement, de me recueillir, de cueillir ce que je venais de réaliser, la possibilité de boucler un cycle et de me régénérer.
Renaitre de ses cendres comme le Phoénix, oser descendre, descendre, parfois toucher le fond, puis remonter lentement, doucement vers la lumière, quitter la sorcière et devenir rivière, fière.

Pour celles qui aimeraient mieux comprendre les différents périodes de leur cycle ainsi que les énergies qui les accompagnent en lien avec les 4 grands archétypes, le prochain atelier calendrier lunaire aura lieu ce samedi 3 décembre à la yourte (région de Rimouski)
http://www.chemins-de-traverse.ca/ateliers-et-conferences/


Pour celles qui lisent Femmes qui courent avec les Loups de Pinkola Estes
Je vous invite à lire ; le passage en lien avec la rage.